CONSCRITS
CONSCRITS est I’un de mes premiers travaux photographiques.
Réalisée entre décembre 1988 et mars 1989 durant mon service militaire, cette série décrit de intérieur, l’univers confiné et décadent d’une fanfare d’appelés, plongée au coeur d’un régiment d’infanterie de Marine à Saint Raphaël (83). La série comporte au total 25 images tirées en 1997 par l’auteur sur papier baryté et une quinzaine d’images coloriées à la main avec l’aide et la complicité de l’artiste chilienne, Zaida Gonzalez Rios. Un livre est en préparation.
LE SERVICE MILITAIRE
par Bernard MAIQUEZ (ex-appelé, Marsouin, 21ème RIMA)
Choc à l’arrivée en voyant une bonne centaine de bonhommes bleus le crâne rasé. Bienvenue au Camp Lecocq, les » classes » peuvent commencer!
Un mois de guéguerre plus tard, nous sommes finalement envoyé dans le bâtiment de la section Musique, une espèce de fanfare militaire.
Les lits superposés ont disparus, c’est maintenant le confort d’un lit simple et de l’armoire « perso ».
Comme les contingents précédents sont en vacances, nous avons la chance d’échapper au bizutage, réservé aux « bleus », les tout nouveaux arrivants. Machisme, tradition et racisme vont bon train à la caserne.
Une sorte de système hiérarchique est transmis de contingent à contingent au fil des années. Ce système stupide régit la vie à la caserne parmi les appelés. Par exemple, pour aller manger, les anciens se placent
devant alors que les nouveaux sont à l’arrière des rangs, par ordre d ‘ancienneté de contingent. Dans le bus qui nous amène aux défilés, c’est le contraire. Et malheur à celui qui essaye de changer cet ordre établi,
ou bien se trompe de place tout simplement; les plus durs sortent leurs muscles et leur bouche, et on peut en arriver à la violence physique très rapidement.
Ce système repose vraiment sur l’idée que « ce que j’ai subi par les contingents précédents, je vais le faire subir de manière égale, si ce n’est plus, aux contingents a venir ».
Et la majorité des garçons jouent le jeu à fond.
Quelque temps plus tard, nous avons droit à la célébration du « Père Cent ». Autre fête débile, de ce système à l’intérieur du système, qui se passe lorsqu’il reste à un contingent encore 100 jours avant la fin
de cette interminable torture de 12 mois. Beuverie à outrance, la meute se lâche, les chiens aboient, la déchéance humaine en plein action…
La déco dans les chambres reste austère, mis a part es incontournables photos de la copine qui côtoient autres photos pornos, ou alors un photo de voiture, à l’intérieur des armoires. Oui nous sommes bien dans l’univers de la « beaufitude » à outrance.
Bref les sorties aux défilés nous ont fait évader de cet univers de la caserne et nous ont aidé à faire passer le temps un peu plus vite, mais jamais assez vite.
Je suis heureux que le Service National n’existe plus.